Un plastique biodégradable inventé en Auvergne pour emballer fruits et légumes

Le concept BioPack, résultat de dix mois de travaux collaboratifs entre les acteurs privés et publics, chercheurs et industriels, a été récompensé par deux « Oscar » de l'emballage lors du salon ALL4PACK, salon international de l'emballage et de l'intralogistique.

On vous explique d'où vient cette innovation 100 % auvergnate, présentée par ces concepteurs comme une « alternative cohérente et durable, avec un impact réduit pour l'environnement ». 

Le produit : un film plastique biodégradable

BioPack, c'est un film plastique biodégradable, respirant et multicouche pour l'emballage et la conservation des fruits et légumes. 

Le produit Biopack, double Oscar de l'emballage 2018. photo Fred Marquet

A la base, c'est un besoin des industriels de l'emballage, pour un marché de niche : les emballages des fruits et légumes biologiques. « Si ces fruits sont emballés dans des barquettes de cellulose, c'est tout simplement parce qu'ils sont plus fragiles car ils sont produits sans pesticides issus de la chimie, explique Laurent Massacrier, de Green Business and Consulting Company, au coeur de cette innovation. Pour les conserver plus longtemps, l'emballage est indispensable. »

Autant, notamment pour des raisons de marketing, proposer un emballage qui correspond à ce que le client d'un magasin bio peut attendre.

Ancien de Limagrain, et ancien élève de Polytech Clermont, Laurent Massacrier a déjà travaillé sur des sujets proches au sein de la coopérative agricole. Il a confié la mission technique à Fabrice Audonnet, enseignant chercheur à Polytech, en physique et chimie, spécialiste de la science des matériaux.

Et il a fait le lien avec les sociétés CDL Omnipac (leader de la barquette en cellulose moulée) et Leygatech, spécialiste du film d'emballage alimentaire en Haute-Loire, à la recherche d'un film de packaging biodégradable multicouche :

« On fait déjà du film biodégradable, explique Jean-Matthieu Brouillat, directeur technique de la société Leygatech. Ce type de produit, qui offre en plus une qualité de respiration importante, est indispensable pour prolonger la durée de vie des aliments, il y a une sorte de logique à opter pour le biodégradable pour des fruits et légumes. »

Vraiment biodégradable et biosourcé à 50 %

Attention, les plastiques biodégradables ne le sont souvent qu'en théorie. « Dans la vraie vie, c'est plus compliqué », prévient Vincent Verney, chercheur à l'institut de chimie (Sigma Clermont et CNRS) spécialiste du vieillissement des plastiques, qui a été associé à la création du produit. Les conditions de leur dégradation sont souvent trop complexes pour être effectives, sans parler des additifs qui peuvent se rajouter.

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Le plastique BioPack est biodégradable en compostage industriel : au bout de trois mois, il se décompose à 90 %, le reste étant de la biomasse utilisable en compost. 

Dans un compost individuel, ce serait plus long ; encore plus dans la nature ; et encore encore plus dans la mer.  

Le plastique biodégradable reste tout de même un plastique, issu à 50 % du pétrole et à 50 % de la chimie verte (chardon), un choix qui dépend « de raisons techniques et économiques ». Car au-delà de ces qualités, la réalité économique du marché dicte évidemment sa loi : un plastique à 100 % vert ne serait pas intéressant économiquement. 

Une innovation 100 % auvergnate

« Je me suis rapproché de Polytech, pour avoir accès à des compétences et des outils de bon niveau, qu'on ne trouve pas dans l'industrie», explique Laurent Massacrier. Pour les universitaires, c'est tout bénéfice : 

Pour un enseignant-chercheur, il est important de faire de la recherche appliquée avec un industriel derrière, confie Fabrice Audonnet C'est toujours bon de montrer à nos étudiants ce que l'on peut produire

« On peut partir du fondamental et arriver à des applications concrètes, c'est même très intéressant pour nous, confirme Vincent Verney. Il faut du temps, des moyens, il faut aussi s'organiser. » Même son de cloche chez l'industriel : « On travaille assez souvent à des projets collaboratifs avec la recherche, indique Jean-Matthieu Brouillat, de Leygatech . Et on arrive à de très beaux résultats, parfois en partant d'applications très théoriques. »

Le plastique, c'est polémique

Pour l'entreprise, cette innovation a vocation à répondre aux exigences d'un marché qui remet en cause l'utilisation du plastique tout en ayant créé une dépendance pour certaines utilisations : 

On aura toujours besoin de plastique dans l'alimentaire ou le médical, assure Jean-Matthieu Brouillat. Il est vrai qu'il faut être plus vertueux sur la fin de vie

Vincent Verney serait tenté de chanter « le plastique c'est fantastique » mais il ne parle que de la matière, pas de sa fin de vie : « Le plastique permet beaucoup de choses grâce à sa qualité première qui est aussi son défaut : il est quasiment éternel. 400 ans pour un sac plastique : mais personne n'a pu encore le vérifier ! Le but de la recherche est de trouver la bonne adéquation entre, d'une part, la durée d'application du produit et, d'autre part, le taux de renouvellement de la ressource et sa durabilité. » 

Philippe Cros

 

Source : http://www.lamontagne.fr/clermont-ferrand/economie...